La pelade a été en 2023, sous le feu des projecteurs. Les traitements inhibiteurs de JAK ont fait beaucoup de bruits, ce qui, parfois, nous empêche de réellement entendre.
Dans cet article, nous ferons le point sur les avancées des traitements de la pelade, en tentant la plus grande objectivité possible. Parce que le bien-être des patients est notre priorité.
Dans les traitements de référence, à date, nous pouvons citer :
– La corticothérapie locale
– Les injections de cortisone dans la peau
– La photothérapie
– La corticothérapie générale (dans certains cas particuliers)
– L’immunothérapie de contact (dans certains centres)
– Le méthotrexate
– Les anti Jak
En 2014, une étude multicentrique randomisée en double aveugle a été débutée. Il lui a fallu plusieurs années pour se terminer, analyser les données et être publiée. 89 patients ayant une pelade décalvante ou universelle ont été inclus afin d’évaluer la tolérance et l’efficacité sur le moyen terme du méthotrexate sur des pelades étendues.
Le méthotrexate est un immunosuppresseur (ndlr).
L’étude a été menée en France sous l’égide du docteur Pascal Joly et a récemment été publiée dans la revue JAMA Dermatology.
Le contexte : étude menée dans 8 services universitaires incluant des patients ayant un épisode de pelade décalvante ou universelle depuis plus de 6 mois et moins de 5 ans. L’essai en double aveugle comprenait :
– Un groupe recevant du méthotrexate pendant 6 mois ;
– Un groupe sous placebo pendant 6 mois.
Les patients ayant obtenu une repousse d’au moins 25% continuaient le traitement initialement reçu pendant encore 6 mois, tandis que les autres furent répartis en deux nouveaux groupes :
– Un groupe sous méthotrexate couplé à de la cortisone (prednisone) pendant 6 mois ;
– Un groupe sous méthotrexate et sous placebo de cortisone pendant 6 mois.
Résultats : 1 seul patient sous méthotrexate seul a obtenu une repousse complète (sur 89).
20% des patients ayant reçu le placebo pendant 6 mois puis ayant reçu du méthotrexate et de la cortisone pendant 6 mois ont eu une repousse complète à 12 mois
31% des patients ayant reçu du méthotrexate pendant 12 mois et 6 mois de cortisone ont eu une repousse complète (test sur 16 patients seulement).
La tolérance fut globalement bonne et les effets secondaires légers.
Conclusion : selon les auteurs de l’étude, les résultats de cet essai sont du même ordre voire supérieurs à ceux récemment publiés avec les anti JAK (mais effectués à plus grande échelle), avec un coût bien moindre.
Les effets secondaires liés au méthotrexate sont très modérés mais, en revanche les effets secondaires liés à la corticothérapie générale sur le long terme sont plus discutables dans une pathologie comme la pelade. Ces résultats sont plutôt à considérer comme un jalon dans le traitement de la pelade décalvante ou universelle.
Qu’en est-il des inhibiteurs de JAK ?
En 2022, l’avis favorable des instances européennes et françaises pour leur mise sur le marché dans le cadre de la pelade sévère a beaucoup « agité » les laboratoires.
Beaucoup d’études ont été financées par ces derniers (Lilly, Pfizer notamment) afin de mettre en lumière les effets positifs des anti JAK sur la pelade.
Différentes molécules (toutes faciles à prendre par voie orale) entreront bientôt dans le circuit des thérapeutiques :
– Baricitinib
– Ritlécitinib
– Brepocitinib
– Deuruxolutinb
Comme indiqué plus haut, leur efficacité est intéressante, principalement sur les pelades sévères (versus les pelades très sévères).
Dans les études publiées, toutes pelades « sévères » (plus de 50% de la surface du crane) ou « très sévères » (décalvante ou universelle) confondues, des repousses totales ou quasi totales ont été observées, à 6 mois, dans 33% des cas environ, sous anti JAK (en moyenne, variable selon les molécules testées).
Dans les cas de pelades très sévères (décalvantes ou universelles exclusivement), le taux de repousses est plus proche de 15 à 20% : 13,9% à 6 mois avec le baricitinib qui a récemment obtenu l’autorisation de mise sur le marché en France.
Rappelons que comme tout traitement dans la pelade, les anti JAK ont un effet suspensif et qu’une rechute est attendue dans 8 à 16 semaines suivant l’arrêt.
Les effets secondaires sur le court terme dans la pelade semblent le plus souvent modérés. C’est sur le long terme que des questions subsistent : existe-t-il une augmentation du risque de cancers (viscéraux notamment pulmonaires, de carcinomes cutanés sévères) ? De lymphomes ? D’infarctus ou d’embolie pulmonaire ?
Les avantages, la balance bénéfices/risques doit être bien mesurée et sérieusement discutée avec son professionnel de santé.
Les inhibiteurs de JAK sont des traitements très onéreux en comparaison des autres traitements et de manière générale pour notre système de soins, la prise en charge par la sécurité sociale reste à définir de manière plus précise.
Dans une société où la disparition du symptôme est la règle, où le traitement est un automatisme, l’association pense sérieusement aussi qu’une autre voie doit être envisagée : celle de la normalisation de la différence, pour qu’aucun et qu’aucune n’ait le sentiment d’être « obligé » de se traiter.
Cette voie ne veut pas dire qu’elle doit devenir « la nouvelle règle », mais une autre possibilité. Beaucoup de choses restent encore à faire, mais, avec vous tous et toutes, je sais que tout est possible. Absolument tout.
Catherine Tormo
Présidente