Décembre 2020, un petit trou sans cheveu apparaît sur le haut de mon crâne, pas grave, un peu de stress sûrement…En février un deuxième, juste derrière. Je commence à m’inquiéter un peu mais c’est les vacances…
En mars, les 2 trous ne cessent de s’agrandir. Rendez-vous chez la dermatologue qui ne sait pas ce que c’est, mais me prescrit une pommade aux corticoïdes…que je ne supporte pas et qui me fait des plaques brunes partout où je l’étale. Retour chez la dermato qui me dit « On arrête tout et on se voit dans un mois pour des injections de kenacort ».
Et là commence la descente aux enfers…je me revois dans la rue avec mon crâne pelé, sans traitement, sans diagnostic…j’ai 48 ans, mariée 2 enfants, Principale de collège, comment est ce que je vais pouvoir continuer à vivre si je deviens chauve ?
Et je perds le sommeil pendant 4 semaines. Toute la nuit je cherche une solution, je compte mes cheveux, je suis persuadée que je vais perdre mon mari, mon boulot… Je bosse au radar, tout le monde voit que cela ne va pas mais que faire ? je finis par décompenser et je me retrouve pour la première fois de ma vie devant une psychiatre (moi ! la femme forte, qui réussit bien, qui a une vie sympa, 2 enfants adorables, un chouette boulot, le même mari depuis 27 ans !!?? qu’est ce que je viens faire dans cette galère ?)…premier arrêt maladie de ma vie, 3 semaines sur mon canapé à vouloir en finir…et à réapprendre un peu à dormir.
Et je la cherche, cette solution … et je tombe sur vous, les alopéciques de tous bords, les pelades, les AAG, les SOPK et je vous trouvent tellement extraordinaires, belles, grandes dans l’adversité…que je me dis que c’est possible.
Et je m’achète des turbans. Je me familiarise avec, je sors avec, je reprends le boulot avec et ça passe ! j’informe la salle des profs du problème et je récolte, avec surprise, beaucoup d’empathie et de regards bienveillants. J’ai longtemps pensé que les élèves n’en avaient rien à faire mais j’ai appris par la suite qu’ils harcelaient les surveillants de questions car ils pensaient que j’allais mourir. J’ai demandé qu’on leur dise la vérité et je me dis que si parmi eux (surtout elles !) il y en a une à qui cela arrive un jour, elle se rappellera que la principale portait un turban et que tout le monde l’acceptait et la respectait quand même.
Entre temps j’ai eu des injections dans la lésion, 2 biopsies, et toujours aucun diagnostic. Les dermato de l’hôpital envoient mon dossier au centre Sabouraud, le directeur leur renvoie en disant « c’est une bactérie ! ». Bonne nouvelle ! une bactérie ça meurt et ça disparaît, ça me va très bien comme diagnostic, du coup vacances d’été sympas, enturbannées mais pleines d’espoir…sauf que c’est pas ça et que malgré 3 mois d’antibiotiques les trous se rejoignent et forment une plaque de plus en plus visible.
Je harcèle le centre Sabouraud et je finis par décrocher un rendez-vous début octobre. Là on me confirme le nom de la bête : il s’agit d’un lichen plan pilaire, une maladie auto-immune de M…qui va me bouffer les cheveux par la racine presque jusqu’au dernier si on ne l’arrête pas. Sauf qu’on ne sait pas bien comment l’arrêter justement. Aucun autre problème de santé, tout va bien ….et on me colle sous corticothérapie de cheval qui me fout en vrac, m’empêche de dormir mais que j’ai choisi de tenter une fois 3 mois pour ne pas avoir de regrets…sachant que ce mal est chronique et que de toute manière, la bête finit toujours par se réveiller.
Mais parallèlement je remonte doucement la pente, parce que la vie continue, que j’ai des enfants et que tout ne tient pas à des cheveux…normalement.
Avec des étapes clés : un mari qui ne m’aime pas pour mes cheveux (ça tombe bien), une ado qui me dit qu’elle veut que je mette mon turban pour faire du shopping avec elle parce qu’elle trouve que ça fait classe (en tout cas plus que ma pauvre chevelure), des copains qui en font gentiment un sujet de plaisanterie et qui veulent se cotiser pour m’acheter une perruque blonde (je suis d’origine espagnole …)..et le bonheur revient, parfois par surprise, par petit moments de grâce…en vous lisant et en vous regardant vivre votre combat aussi.
Je suis encore au milieu du chemin, pas sûre d’en sortir complètement indemne, mais si j’avais des conseils, ils seraient :
– N’hésitez pas à en parler, sans pathos mais franchement, les gens sont plutôt bienveillants et surtout nous n’avons pas à avoir honte !
– Les turbans sont une alternative tout à fait acceptables, surtout s’il vous reste un peu de cheveux devant et derrière, je vis en province, dans une ville moyenne, je suis la seule à me promener avec cet accoutrement mais jamais je n’ai senti de regards « bizarres » sur moi, ni de réflexion désobligeante.
– Allez essayer des perruques et des compléments capillaires, c’est bluffant ! et rassurant de savoir que c’est possible de les adopter. Souvent les personnes qui vendent ces produits sont sympathiques et à l’écoute (sinon fuyez !)
Voilà…un trop long témoignage mais si cela peut aider ne serait-ce qu’une personne, cela me ferait plaisir. Et je suis disponible sur insta pour discuter si besoin (compte: @hpgwen).
Gwennaelle